« En ce qui concerne les problèmes de disponibilité de Minecraft en Iran, ils résultent souvent du respect des lois et des sanctions internationales. Microsoft et d'autres entreprises technologiques sont parfois tenues de restreindre l'utilisation de leurs logiciels et services dans certains pays en vertu des lois et réglementations du gouvernement américain. Il ne s'agit pas d'une action contre des joueurs ou des pays individuels, mais plutôt d'une obligation légale que les entreprises doivent respecter », répond Microsoft aux plaintes d’un gamer iranien sevré d’accès au jeu en ligne Minecraft pour lequel il a pourtant déboursé de l’argent.
La Russie est la cible de sanctions similaires au travers de mesures appliquées par Amazon, Microsoft et Google
La mesure a pris effet le 20 mars 2024 : Amazon, Microsoft et Google vont sevrer les entreprises russes de leurs services d’informatique en nuage. Ces développements sont issus de la société russe Softline, qui a déclaré avoir reçu une notification directe de Microsoft et d'Amazon au sujet de la suspension. Softline a partagé cette information par différents canaux, notamment par une déclaration d'Elena Volotovskaya, vice-présidente de l'entreprise chargée des investissements, sur son canal Telegram. Selon Softline, l'arrêt de ces services signifie qu'à partir de la date spécifiée, les entreprises russes ne pourront plus utiliser ces produits en nuage, ni accéder aux données qui y sont stockées.
C’est la raison pour laquelle Vladimir Poutine multiplie les initiatives d’affranchissement des technologies américaines
Vladimir Poutine a chargé le gouvernement d’organiser la production nationale de console de jeux vidéo, de services de gaming en nuage et de systèmes d’exploitations souverains. Le gouvernement est susceptible de confier les aspects logiciels de l’initiative à la société russe VK derrière le lancement du magasin d’applications RuStore en réponse au retrait des alternatives occidentales. L’industriel GS Group spécialiste en production des systèmes électroniques est pressenti comme chargé de la fabrication en sous-traitance des appareils dans le cadre de ce projet de création de consoles de jeux vidéo, de services de gaming en nuage et de systèmes d’exploitations souverains.
Le tableau n’est pas sans faire penser au Runet – l’Internet souverain russe. L’une des idées derrière l’Internet souverain russe est de permettre à Moscou de se doter d’un poste de commandement unique à partir duquel les autorités peuvent gérer les flux d’informations dans le cyberespace russe (alias Runet) ; cela inclut la surveillance, la limitation ou le blocage de ces flux sur toute ou partie de l’étendue du cyberespace russe. Ce dernier s’appuie donc sur son propre système de noms de domaine pour lui permettre de continuer à fonctionner, ce, même s'il était coupé du web mondial. L'objectif, selon les autorités russes, est de « garantir un Internet stable, sûr et transparent. »
D’un point de vue technique, le Runet est architecturé autour de dispositifs spéciaux qui intègrent un logiciel de surveillance des milliers de points d’échange entre la Russie et le Web au sens large. Ces derniers sont chargés d’alimenter le centre névralgique d’analyse en temps réel des volumes et les types de trafic installé au sein du Roskomnadzor – le régulateur russe en matière de télécommunications.
D’après les retours des autorités russes, le premier test en 2019 s’est passé avec succès. « Il s'est avéré qu'en général, tant les autorités que les opérateurs de télécommunications sont prêts à répondre efficacement aux risques et menaces éventuels et à assurer le fonctionnement de l'Internet et du réseau unifié de télécommunications en Russie », a déclaré Alexei Sokolov – directeur adjoint du ministère du Développement numérique, des communications et des médias lors de la conférence dédiée.
Gitee est l’une des initiatives chinoises d’extirpation de la dépendance aux technologies américaines
Une sortie d’un responsable de Huawei en lien avec ce développement en dit long sur l’objectif : « Si la Chine ne dispose pas de sa propre communauté open source pour maintenir et gérer les projets, notre industrie nationale du logiciel sera très vulnérable à des facteurs incontrôlables. » L’intervention de Wang Chenglu pointe du doigt les sanctions à répétition des autorités américaines. Sur le seul cas GitHub, on peut remonter à l’an dernier pour entamer une illustration de ce qui constitue les craintes des autorités chinoises.
L'un des signalements (qui a fait surface en juillet 2019) d’un utilisateur du service web d’hébergement et de gestion de logiciels touche en premier à ceux qui font usage de GameHub sous Linux. L’application sert à centraliser dans une bibliothèque tous les jeux en provenance de Steam, GoG, Humble Bundle, Humble Trove ainsi que les jeux installés de manière indépendante en local. Grâce à GameHub, il est possible de voir d’un seul coup d’œil, mais aussi de télécharger, installer, désinstaller et lancer ses jeux, mais aussi les bonus ou les DLC en provenance de GoG.
« Mon compte a été bloqué en raison des sanctions américaines car je vis en Crimée. Je pourrais ne plus être capable de maintenir GameHub dans le futur », rapportait-il dans un ticket ouvert sur la plateforme.
Le cas GameHub s’inscrivait dans la même vague que celui d’Ahmed Saeedi Fard – un développeur iranien présent sur la plateforme depuis 2012. Ce dernier avait reçu un courriel des gestionnaires de la plateforme pour lui notifier un blocage de son compte en raison des sanctions américaines.
Ces différentes plaintes faisaient suite à une annonce de GitHub relative à la possibilité de créer un nombre illimité de référentiels privés (des projets logiciels non visibles par le grand public, mais seulement par une poignée de collaborateurs prédéfinis) sur GitHub et l’offre est gratuite. Cet état de choses avait suscité un grand intérêt dans la communauté des développeurs et poussé certains à migrer de façon totale sur la plateforme, voyant ainsi certains de leurs référentiels privés verrouillés.
« GitHub était une plateforme libre pour tous depuis de nombreuses années, mais elle a décidé de bloquer les comptes iraniens. Je pense qu'être d'un pays donné n'est pas un choix qu'on fait, mais être un développeur et contribuer à la communauté open source l'est. GitHub nous interdit notre liberté de contribuer et de faire partie de l'écosystème open source parce que nous vivons en Iran.
GitHub a bloqué nos dépôts privés sans aucune notification préalable et maintenant nous n'avons pas accès aux codes. Vous ne devriez pas juger les gens en fonction de leur pays d'origine. Vous pouvez restreindre un gouvernement, mais vous ne devriez pas interdire vos utilisateurs actifs et loyaux sans aucun avertissement.
Je pense qu'avoir une simple page GitHub est un droit fondamental pour les utilisateurs. Ne nous mettez pas en dehors de la communauté open source », avait-t-il lancé.
La disponibilité de Gitee a un bon côté : elle vient créer de la concurrence dans un secteur des services en ligne dominé par les plateformes US. Elle n’échappe cependant pas à la dualité, la Chine étant connue comme le pays où la fiction Big Brother de 1984 tend à devenir réalité. Avec ses 10 millions de dépôts, les autorités chinoises positionnent déjà Gitee comme deuxième plus grosse plateforme d’hébergement et de gestion de projets logiciels open source. Les murs ne cessent de s’élever de part et d’autre et avec eux le risque que l’on s’achemine de plus en plus vers la fin du rêve d’Internet : communication sans frontières et connaissance pour tous.
Source : Microsoft
Et vous ?
Les sanctions contre la Russie et autres Iran vont-elles paralyser définitivement leurs industries technologiques ou au contraire entraîner l’accélération de leur indépendance vis-à-vis de l’Occident ?
Quel commentaire faites-vous de la position de l'Europe dans ce contexte ?
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