« Je n'avais pas d'amis dans ma ville natale et je me sentais pressé de devenir financièrement indépendant le plus vite possible. Je suis donc devenu un hikikomori avec l'objectif de vivre chaque jour en ne faisant que des choses qui en valent la peine », indique-t-il.
Incapable de trouver un bon emploi après avoir obtenu son diplôme universitaire à Tokyo ou de réaliser son rêve de devenir romancier, Nito est retourné dans sa ville natale pour s'exercer au dessin dans l'espoir de devenir un créateur de bandes dessinées et autres œuvres auto-éditées. Il avait initialement prévu de rester un hikikomori pendant trois ans seulement ou jusqu'à ce qu'il puisse subvenir à ses besoins. Le rêve de Nito de devenir autonome grâce à ses propres créations l'a finalement incité à apprendre l'anglais et le développement de jeux à partir de 2015. Il consacre ses efforts à la filière jeux vidéo depuis 5 ans. Aujourd'hui, avec des compétences en anglais courant et son premier jeu prêt à être lancé sur Steam, son travail acharné commence à porter des fruits. Le projet sort d’une campagne de levée de fonds réussie sur la plateforme Kickstarter. Le lancement du jeu est initialement prévu pour le mois d’avril de l’année en cours est repoussé à avril 2023.
Durant 3 ans, Luke Rissacher s’est de même investi de façon active pour développer un jeu, mais après des milliers d’heures consacrées à ce projet et l’écriture de dizaines de milliers de lignes de code, ce développeur s’est rendu compte de la réalité amère du marché des jeux vidéo indépendants. Malgré une réception positive dans les forums et Reddit, 4 copies seulement du jeu Infinitroid ont été vendues. Son jeu a été acheté par des gens “généreux” qui avaient déjà eu un accès gratuit, mais ils ont voulu quand même supporter son développement. Rissacher explique qu’avant qu’il mette son jeu en vente, il avait rencontré du succès, avec 368 personnes créant un compte gratuit. Selon ses statistiques, les gens ont passé 1080 heures à jouer et beaucoup le font de façon quotidienne ou hebdomadaire. Tout portait à croire que le jeu allait réaliser des ventes, aussi minimes qu’elles soient, mais au moins il y aura des ventes. Mais entre la période de novembre 2017 et février 2018, sur les nouveaux 1016 visiteurs du site, aucune personne n’a acheté le jeu, débouchant donc vers un taux de conversion de 0 %.
Le cas Rissacher n’est pas isolé dans cette sphère dite du jeu vidéo indépendant (des jeux vidéo créés sans l'aide financière d'un éditeur de jeux vidéo). Elle connaît une montée en puissance depuis le début des années 2000, notamment grâce à la distribution dématérialisée des jeux vidéo. Depuis 2014, la filière connaît une explosion, parfois appelée tsunami indie /indiepocalypse. Non seulement le nombre de jeux vidéo croît à un rythme exponentiel, mais aussi le rythme de lancement de nouveaux titres. Bien que beaucoup de jeux sont des shovelwares Unity (c’est à dire des jeux lancés de façon hâtive), beaucoup de titres sont peaufinés et ont requis beaucoup d’effort de développement. Seulement, seul un pourcentage minime de jeux a rendez-vous avec le succès, la plupart sont oubliés dans le raz-de-marée.
Le jeu Scanner Sombre de Mark Morris et Chris delay a fait un flop total, malgré que ces développeurs ont connu une série de succès auparavant. De même pour The End is Nigh d’Edmund McMillen qui a réalisé des ventes modestes malgré le fait que le développeur réputé de la scène indé a déjà travaillé sur des blockbusters comme Super Meat Boy et Binding of Isaac. Dans les chiffres, Luke a passé plus de 2600 heures à développer Infinitroid et a écrit 62 176 lignes de code (essentiellement en C++). Le jeu a réalisé juste 27,92 dollars, soit près de 0,01 $ l’heure. S’il avait choisi de passer son temps à laver la vaisselle pour 7,25$ l’heure (un job 725 fois plus lucratif), il aurait gagné 19 000 dollars.
Source : Nito Souji
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